La courbe des taux s'inverse

May 15, 2023

Naturellement en pente ascendante

Rappelons d’abord brièvement ce qu’est une courbe des taux, et servons nous pour cela d’un exemple parlant : l’emprunt immobilier. Tout le monde sait que les banques proposent des taux plus bas pour des emprunts à court terme (5 ou 10 ans) que pour des emprunts longs (15, 20 ou même 25 ans). C’est logique : plus vous empruntez à long terme, plus vous “immobilisez” la ressource de la banque et plus elle encourt le risque de ne pas se faire rembourser.

Prenons maintenant le cas de l’État français, qui emprunte lui aussi de l’argent. Il le fait notamment via des émissions obligataires à destination d’investisseurs institutionnels (compagnies d’assurance, grands fonds de pension, gestionnaires de fortunes etc.). Comme pour un emprunt immobilier, la France paiera des intérêts au fil du temps (on dit “coupon” dans le langage obligataire) et remboursera ensuite cet emprunt à l’échéance.

Ces Obligations Assimilables de Trésor (OAT) sont émises sur de nombreuses échéances, allant de 2 à 50 ans. La qualité de l’émetteur est bien constante — il s’agit de l’État français — mais les taux d’intérêt demandés par les investisseurs augmentent typiquement avec la durée de l’emprunt. 

La raison est la même que pour l’immobilier : plus l’échéance de l’emprunt est lointaine, plus l’investisseur immobilise ses ressources et prend un risque, certes très faible mais non nul, que l’État français ne le rembourse pas.

Une courbe des taux n’est donc ni plus ni moins qu’une série de points indiquant les taux d’intérêts versés par un émetteur donné, en fonction de la durée des emprunts.

Les deux types de courbes des taux les plus utilisés dans le monde financiers sont :  

  • Les courbes de taux des obligations d’états (les Treasuries aux US, les Gilts au Royaume Uni, les Bunds allemands, les OAT françaises…)
  • La courbe des taux swaps, qui indiquent les taux auxquels les banques s’échangent des flux à taux variable contre des flux à taux fixe. 

La courbe de taux des Constant Maturity Swaps, ou CMS, fait partie de la seconde catégorie. C’est une référence sur les marchés, avec des volumes d’échanges absolument gigantesques.

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Le court… plus cher que le long ?!

Il arrive que la courbe des taux adopte une pente descendante, comme c’est le cas actuellement. On dit alors que la courbe s’est inversée. Cela peut s’expliquer de plusieurs manières.

La crainte d’une récession

La conjoncture économique peut provoquer un inversement de la courbe. Les investisseurs estiment que l'économie ralentit et qu’une récession est possible. En toute logique, ils cherchent alors à placer leurs fonds dans des endroits peu risqués, comme les obligations d’État à long terme. Cela fait naturellement augmenter la demande pour les OAT, et face à une offre stable, les prix des OAT long terme vont mécaniquement augmenter. C’est la loi de l’offre et de la demande. 

Or, les taux d'intérêt évoluent dans le sens inverse de celui des obligations : lorsque le prix d'une obligation augmente, elle propose un taux d'intérêt plus faible, et vice versa. On aboutit donc à une situation où les taux à long terme chutent et passent sous ceux des obligations de court terme.

La lutte contre l’inflation par les banques centrales

La politique monétaire menée par les grandes banques centrales pour vaincre l’inflation contribue également à l’inversion d’une courbe des taux. En effet, quand l’inflation s’envole — comme ce fut le cas en 2022 et encore aujourd’hui — les banques centrales décident typiquement de mettre en place une politique monétaire restrictive. 

Elles augmentent les taux directeurs (les taux d’intérêts auxquels les banques centrales prêtent aux banques commerciales à court terme). Cela renchérit automatiquement les tarifs auxquels les banques commerciales peuvent prêter, et donc le coût de l'investissement et du crédit. La Fed a ainsi augmenté les taux directeurs aux US de 0,25% à 4,75% en un an.

En réhaussant brutalement les taux courts, les banques centrales impactent directement la forme de la courbe des taux.

Dans le cas présent, c’est bien la combinaison des deux facteurs qui ont provoqué son inversion.

Les inversions de courbe durent rarement

Depuis plus de 50 ans, les inversions de courbe ont été aussi rapides que passagères, ne dépassant souvent pas 10 mois. Mais, comme toujours, il est dangereux de généraliser, car à la fin des années 1970, la courbe des taux est restée inversée pendant 21 mois. Toujours est-il que le sens de l’histoire est clair : l’inversion de la courbe des taux ne perdure pas, et sa forme se “normalise” typiquement dans les douze mois qui suivent l’adoption d’une forme descendante.

Comment tirer profit de l’inversion de la courbe des taux ?

Armés de cette statistique, comment pourrions-nous en tirer profit ?

Profiter de l’inversion de la courbe des taux, en théorie

Si l’on anticipe un retour à la normale dans les trimestres à venir, il est possible de se positionner afin d’en profiter.

Dire que la courbe des taux va se normaliser et retourner à sa pente “normale”, revient à estimer que les taux à long terme — aujourd’hui inférieurs aux taux à court terme — vont monter par rapport aux taux courts (nous insistons ici sur le fait qu’il s’agit d’un mouvement relatif des taux longs par rapport aux taux courts).

Rappelons-nous que les prix des obligations varient inversement aux rendement de ces titres.

Il s'ensuit que pour tirer profit d’une hausse anticipée des taux longs, il faudrait vendre des obligations à long terme. Tout en achetant simultanément des obligations à court terme, dont on pense que les rendements vont tomber.

Le problème de la stratégie décrite ci-dessus est qu’elle est complexe à mettre en place pour le commun des mortels. Il faut savoir sélectionner les obligations parmi un large éventail d’OAT possibles. Pour acheter certaines obligations, un ordre de bourse auprès d’un spécialiste suffira, mais pour vendre d’autres obligations à découvert, la documentation et les vérifications seront beaucoup plus lourdes. Et les intermédiaires exigeront probablement que les positions prises représentent un montant conséquent (une des méthodes pour s’assurer que l’investisseur puisse être reconnu comme étant “qualifié”). 

Bref, une belle stratégie sur papier, mais pas évidente à réaliser dans la vraie vie.

Le Produit Structuré “Target C. Juin 2023” à la rescousse

Heureusement, il existe des façons bien plus accessibles de profiter d’une évolution probable de la courbe des taux.

Si vous pensez que la courbe des taux, actuellement inversée, pourrait reprendre sa forme ascendante habituelle dans les années à venir, le produit structuré “Target C. Juin 2023” a été spécifiquement conçu pour en tirer profit.

Il s’agit d’une obligation émise par la Société Générale avec une échéance finale de 10 ans. La première et la seconde année, cette obligation versera un coupon de 8% (garanti).

À partir de la 3ème année, il versera l’écart (positif) entre le taux CMS 30 ans et le taux CMS 5 ans. Cette différence est aujourd’hui égale à -0,366% (calcul fait le 12 mai), car la courbe des taux est actuellement inversée). Mais dans 3 ans, il est possible (certains diraient probable) qu’elle soit à nouveau positive. Car historiquement, cette différence est bien positive, comme l’illustre le graphique ci-dessous.

Imaginons à titre d’illustration que dans 3 ans, la différence entre les deux taux soit égale à 0,65%. Vous recevez alors ce pourcentage en intérêts.

Même calcul l’année d’après. Si la courbe des taux est toujours ascendante, re-belotte, vous toucherez la différence entre les deux points sur la courbe. Imaginons que ce différentiel soit toujours égal à 0,65%, vous recevrez alors à nouveau 0,65%.

Dernier élément clé de la formule. L’obligation se rembourse par anticipation lorsque la somme des coupons versés atteint ou dépasse 17%. Ce serait donc le cas dans notre exemple (car 8% + 8% + 0,65% + 0,65% = 17,30%).

Vous aurez donc touché 8% les deux premières années, puis 0,65% les deux années suivantes. Pour un rendement annuel moyen de 4,325% par an.

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