Produits structurés: pourquoi les banques en proposent?

Mar 9, 2023

Cashbee propose depuis quelques mois des produits dits “structurés”, conçus pour viser des rendements attractifs, tout en protégeant tout ou partie du capital investi par l’épargnant. Ces solutions paraissent magiques — “pile je gagne, face je ne perds pas” — et rencontrent donc naturellement un grand succès auprès de nos clients. 

Mais si la proposition de valeur est attractive pour les investisseurs, quel est l’intérêt pour les grandes banques ? N'y a-t-il pas anguille sous roche ? Comment les émetteurs de produits structurés s’y retrouvent ? Explications.

Les produits structurés sont un moteur de financement

L’intérêt pour l’épargnant

Pour les individus (ou les entreprises) qui y souscrivent, les produits structurés sont une bonne façon de diversifier leurs portefeuilles et de contrer simultanément les effets de l’inflation. Ce sont des placements conçus pour viser des rendements attractifs, en tous cas plus élevés que ceux proposés par des placements comme le Livret A, mais qui dans le même temps n’exposent pas (ou seulement partiellement) le capital investi aux fluctuations du marché actions.

Les produits structurés sont donc un bel “entre deux”. 

Certes, le gain des produits structurés est connu d’avance, là où il est, en théorie, illimité sur des investissements en actions. Mais ce plafonnement de votre performance vient avec une belle contrepartie : votre capital est partiellement ou même totalement garanti. Alors que pour les actions, vous pouvez, en théorie toujours, perdre la totalité de votre investissement.

Il est donc légitime de s’intéresser à ceux qui fabriquent et proposent ce type de placement. Qui sont-ils ? Quel est leur intérêt ?

Les banques s’endettent

Un produit structuré est en termes juridiques une obligation, c’est-à-dire un titre de reconnaissance de dette. Cette reconnaissance de dette est fournie (on dit qu’elle est “émise”) par une banque. 

Parce que oui, les banques s’endettent. N’oubliez pas qu’une banque doit avoir de l’argent avant de pouvoir le prêter. Elles en collectent grâce à vos dépôts bien sûr, mais aussi en s’endettant sur les marchés obligataires, où elles empruntent énormément. Après les émissions obligataires étatiques, c’est-à-dire la dette des États comme la France, les banques sont les émetteurs les plus importants sur les marchés de capitaux en volume. 

Petit rappel sur le fonctionnement d’une obligation traditionnelle

Une obligation traditionnelle émise par une banque n’est finalement qu’un emprunt. Cet emprunt est découpé en morceaux d’une valeur égale et contracté auprès de plusieurs épargnants — parfois des milliers.

Pour le dire autrement, c’est comme si vous (individu) faisiez un emprunt immobilier, non pas auprès d’une banque, mais de centaines d’autres personnes, chacun à part égales.

L’emprunteur, (ici, la banque, aussi désignée comme l’émetteur de l’obligation) s’engage contractuellement à verser des intérêts sur la somme empruntée aux prêteurs (ici, les épargnants qui décident d’acheter l’obligation), puis de rembourser ces prêteurs au bout d’une période prédéterminée, qui se compte typiquement en plusieurs années.

Les intérêts sont exprimés en pourcentage, et ils sont le plus souvent calculés par an. Dans le langage obligataire, on parle de coupon annuel. Si BNP Paribas émet par exemple une obligation de 1 milliards d’euros à 5 ans, à un coupon de 5%, cela signifie que la banque va verser 5% sur ce milliard d’euros (soit 50 millions d’euros) tous les ans pendant 5 ans. À la fin de la 5ème année, elle remboursera aux investisseurs le milliard initialement prêté.

Fonctionnement d’une obligation

Jusque là, tout va bien.

Le produit structuré : une obligation… à formule

Comme pour une obligation traditionnelle, un produit structuré est une reconnaissance de dette, échangeable, avec une date de début et une date de fin (l’échéance). Mais ses caractéristiques sont plus complexes qu’une obligation traditionnelle, car le coupon versé par la banque émettrice, la durée de l’emprunt et le montant dû à l’échéance peuvent tous être soumis à une formule précise. Pour le dire très simplement : un produit structuré est une obligation avec des “SI…”. 

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L’exemple de Pyrite 1

Prenons un cas concret. Cashbee commercialise actuellement le produit structuré Pyrite 1. Ce placement possède les caractéristiques suivantes : 

  • Banque émettrice : Goldman Sachs
  • Maturité Finale : 2033, dans 10 ans
  • Coupon cible annuel : 10,20%
  • Rappel automatique : à partir de la fin de la première année, le rappel automatique se déclenche lorsque l’Indice Sous-jacent dépasse son niveau constaté au départ à une Date de Constatation
  • Dates de Constatation : tous les trimestres, à partir de la fin de l’année 1
  • Indice Sous-jacent : Morningstar Luxury Goods Static 10 Décrément 50
  • Protection du Coupon à la Maturité Finale : -20%
  • Protection du Capital à la Maturité Finale : -50%

Il s’agit bien d’une obligation, émise par la banque d’affaires américaine Goldman Sachs. Elle s’engage à verser un rendement de 10,20% par an (ou plutôt 2,55% par trimestre), pour tout trimestre écoulé entre la date d’émission et la date de constatation à laquelle un certain indice dépasse son niveau constaté au départ. SI l’indice repasse au-dessus du niveau de départ à l’une de ces dates, vous recevez les coupons correspondant. Mais SI l’indice ne dépasse jamais son niveau de départ à aucune des dates de constatation et finit à moins de 50% de son niveau initial à l’échéance (dans 10 ans), l’investisseur ne reçoit aucune rémunération et perd un bout de son capital.

On voit bien que pour l’acheteur de cette obligation structurée Pyrite 1, il existe des incertitudes sur 

  • la durée du placement (entre 1 an et 10 ans), 
  • la rémunération (qui est conditionné par l’évolution d’un indice boursier précis) 
  • le montant remboursé à l’échéance.

À quel tarif se finance la banque ?

Toutes ces incertitudes ne sont pas assumées par la banque émettrice. Ce serait prendre bien trop de risques pour son modèle d’affaires que de faire dépendre son coût de financement de l’évolution d’un indice boursier.

Le modèle d'affaires (simplifié) d’une banque consiste à emprunter de l’argent (à travers des dépôts mais aussi via des émissions obligataires) à un certain taux, pour le prêter à un taux plus élevé à ses clients.

Elle possède donc une certaine grille des taux à laquelle elle est prête à s’endetter, qui varie selon la maturité. Car elle est disposée à payer plus pour de l’argent dont elle pourra disposer pendant de longues années, que pour les dépôts sur les comptes courants, qu’en théorie le déposant peut retirer du jour au lendemain.

Le modèle d’affaires (toujours simplifié) d’une banque en découle : j’emprunte à 2,50% en moyenne, pour prêter à 5%, toujours en moyenne. Même après déduction de mes frais opérationnels, dont notamment les coûts du personnel, je vis bien ! 

So far, so good. Mais que se passe-t-il alors, entre la banque qui souhaite se financer à un taux d’intérêt fixe, et la rémunération, plus élevée, potentiellement versée sur un produit structuré ? Celle-ci est dépendante d’une formule plus ou moins complexe, et (par construction) variable et inconnue d’avance. Il faut bien se couvrir contre ce risque, n’est-ce pas ?

L’intervention des traders

En fait, le taux auquel s’endette la banque n’est qu’une variable dans l’équation permettant d’arriver au profil du produit structuré. C’est un peu la base de la recette mais dans lequel de nombreux autres ingrédients sont ajoutés, pour arriver au résultat final. Et le plat est concocté dans la salle des marchés des banques.

Car pour passer du taux d’endettement effectivement payé par la direction financière de la banque, au coupon (beaucoup) plus élevé potentiellement à verser sur le produit structuré, il y a de la cuisine financière. Pour illustrer la mécanique, nous utiliserons l’exemple précité de Pyrite 1.

Sans rendre cet article trop technique, on peut instinctivement appréhender comment les traders (ou structureurs) extraient de la valeur pour passer d’un paiement fixe de 2,50% par an à un versement potentiel de 10,20% par an.

Plusieurs leviers sont actionnés.

Premièrement, l’acheteur du produit structuré accepte de ne jamais gagner plus que le coupon annuel visé. Il accepte de plafonner son rendement. Ce qui veut dire que si l’indice sous-jacent explose, et augmente de plus que 10,20%, cette plus value ne sera pas à verser à l’investisseur. En termes financiers, on dit que l’investisseur dans le produit structuré à “vendu” le gain potentiel.

Deuxièmement, l’investisseur accepte de ne rien gagner, si l’indice sous-jacent ne dépasse jamais son niveau initial et baisse de plus de 20% à l’échéance. Il accepte même des pertes en capital si le sous-jacent baisse de plus de 50% à l’échéance. C’est peu probable, mais cela pourrait arriver. Dans le jargon financier, il a “vendu” plusieurs options.

Troisièmement, l’investisseur accepte une incertitude sur la durée de son investissement, car il accepte d’être remboursé par anticipation, dès que l’indice sous-jacent dépasse son niveau de départ à une date de constatation. Là aussi, il abandonne quelque chose qui a de la valeur.

C’est la combinaison de ces ingrédients, qui, ensemble, permettent aux spécialistes de marché de concevoir des produits structurés comme Pyrite 1. Ils partent du coût de financement de la banque, pour le booster par l’ajout de différents types d’options et délivrer la formule de rémunération aux investisseurs. 

Une solution gagnant, gagnant, … gagnant ?

Comme expliqué plus haut, l’investissement dans les produits structurés est en effet intéressant pour les investisseurs. Mais c’est aussi un moyen utile pour les banques de se financer. Car les produits structurés ne leur coûtent pas plus chers (ou peut-être même un peu moins chers) que leurs obligations traditionnelles. Par ailleurs, elles attirent d’autres types d’investisseurs, et diversifient donc aussi leurs sources de financement.

Enfin, n’oublions pas les traders dans l’affaire. Les ventes et achats d’options qu’ils exécutent avec d’autres contreparties génèrent également une marge pour la salle des marchés. En parfaite transparence, une partie de cette marge est versée à l’intermédiaire qui distribue le produit structuré. Dans le cas de Pyrite 1, à Cashbee !

Ces alternatives de placement, aujourd’hui très populaires, sont donc bien utiles pour toutes les parties prenantes. Si vous vous demandiez pourquoi les banques émettent des produits dont les caractéristiques peuvent sembler à l’avantage exclusif des investisseurs, soyez rassurés… Tout le monde y trouve son compte ! Ce n’est pas un produit aussi magique que ça.

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