Pétrole: l'église Anglicane ne le financera plus

Jun 27, 2023

L’église anglicane vient de décider qu’elle vendrait la totalité de ses parts dans les 11 sociétés pétrolières qu’elle détenait encore en portefeuille. Explications.

L’église anglicane ne financera plus l’industrie du pétrole

Chez Cashbee, nous pensons que la finance peut contribuer et même stimuler la transition énergétique. C’est une des raisons pour lesquelles nous publions régulièrement des articles sur le sujet. Nous en parlons aujourd’hui car l’Église anglicane vient de prendre des décisions radicales dans le domaine.

Il n’est pas difficile de s’imaginer qu’elle soit en faveur de la transition énergétique et de la protection de la planète. Mais il est probablement utile d’établir le rapport entre l'Église anglicane et la finance verte et éco-responsable.

L’Église anglicane gère beaucoup d’argent. Au total, un peu plus de 13 milliards de livres sterling pour être exact. L’institution place elle-même cet argent. En se donnant pour objectif de faire fructifier son argent, à condition que la rentabilité puisse être atteinte de façon compatible avec la religion qu’elle représente.

C’est dans ce cadre que sa direction vient de décider qu’elle vendrait la totalité des actions qu’elle détient dans Shell, Total, Exxon, BP et 7 autres producteurs de pétrole. Selon elle, aucune de ces sociétés n’est alignée avec la lutte contre le réchauffement climatique.

Un investisseur éco-responsable engagé et militant

Un échéancier précis pour engager le changement

La décision de l’Église anglicane ne peut pas paraître surprenante et n’a pas pris les groupes pétroliers de court. Son parlement — car oui, l’église anglicane est dirigée par un parlement — avait annoncé en 2018 qu’elle adoptait une position ferme au sujet de la décarbonation. Elle avait spécifiquement indiqué à cette occasion qu’elle donnait jusqu’à 5 ans aux sociétés pétrolières pour démontrer leur engagement au sujet de la transition énergétique. Sans signes tangibles dans le domaine, l’institution vendrait, en 2023, ses parts dans les entreprises concernées. 

Depuis cette annonce de 2018, ses représentants ont engagé des conversations intenses avec les dirigeants des grandes sociétés de pétrole et de gaz naturel, pour leur faire adopter des modèles d’affaires plus vertueux.

Un investisseur crédible

Élément important, Justin Welby, l'archevêque de Canterbury et président des Commissaires des Églises d’Angleterre, fut lui-même un directeur financier dans l’industrie du pétrole avant de rentrer dans les ordres. Il a récemment rappelé au Financial Times que “l’Église suivra non seulement la science, mais aussi sa foi. Tous deux nous appellent à travailler pour la justice climatique.”

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Des résultats décevants, malgré quelques victoires

Rapidement, l’Église anglicane fait le tri dans son portefeuille, afin de distinguer les sociétés pétrolières avec qui une discussion semble possible. Dans un premier temps, elle vend ses parts dans vingt sociétés pétrolières en 2021. Pour n’en garder que onze, avec qui ses équipes d’investissement engagent le dialogue.

Sa ligne directrice est claire. Il s’agit de trouver une façon pour ces sociétés de s’aligner avec les principes des Accords de Paris.

Pour rappel, sous cet Accord, les nations s’étaient accordées à limiter le réchauffement climatique à moins de 2 degrés, et idéalement à 1,5 degrés, par rapport aux niveaux pré-industriels.

Initialement, ces efforts ont donné lieu à quelques résultats prometteurs. Ainsi, bien qu’étant un actionnaire très minoritaire, l’Église anglicane a réussi à soumettre des résolutions en faveur de la décarbonation à l’assemblée générale d’Exxon. Elle représentait alors un collectif de 700 investisseurs en faveur de la transition énergétique, connu sous le nom de Climate Action 100+.

Mais force est de constater que les changements souhaités n’ont pas été adoptés par les Majors. Pire, certaines ont récemment fait marche arrière dans le domaine. 

Ainsi, il y a peu, Shell a informé ses actionnaires qu’elle souhaitait accélérer son activité de gaz naturel, tout en maintenant sa production de pétrole aux niveaux actuels jusqu’en 2030. Son concurrent, BP a annoncé en février dernier qu’elle ne réduirait pas sa production de pétrole de 40% comme initialement promis. Désormais, elle ne vise plus qu’une réduction de 25%. À un horizon de 10 ans.

Face à cette résistance, John Ball, le directeur général du fonds de pension de l’Église anglicane, a décidé de jeter l’éponge. Et donc de tout vendre. 

Forcer le changement de l’intérieur ou exclure ?

La décision par l’Église anglicane de sortir totalement du secteur pétrolier illustre bien le débat complexe sur les meilleures méthodes pour forcer le changement dans l’industrie du pétrole.

Pendant longtemps, l'Église anglicane estimait qu’en tant qu’actionnaire elle avait l’opportunité de forcer le débat au sein de ces grosses sociétés. Et que c’était justement en détenant des actions des compagnies pétrolières qu’elle pouvait les pousser à décarboner. 

Elle vient de changer son fusil d’épaule pour rejoindre le camp de ceux qui prônent l’exclusion du secteur, en estimant qu’il est non-investissable. Nous ne savons pas laquelle des deux stratégies a le plus de chances de réussir. Et c’est probablement une combinaison des deux qui aura le plus d’impact. Car pour réellement faire bouger les lignes, les deux ont besoin d’un effet de masse. 

Pour forcer le changement de l’intérieur, il faudra que suffisamment d’actionnaires soumettent et votent en faveur de mesures de décarbonation aux assemblées générales. Sachant que ces résolutions pourraient peser sur la profitabilité de l’entreprise, au moins à court terme. 

Alors que pour forcer le changement par l’exclusion, il faudra que suffisamment d’investisseurs refusent d’investir dans le secteur pour rendre l’accès aux capitaux frais compliqué — et donc coûteux — pour les pétroliers.

À suivre … 

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