Parlons vente à découvert

Jan 13, 2020

Dans la plupart des cas, les investisseurs qui placent en bourse le font en achetant des actions. Ils misent sur la hausse d'un titre, espèrent toucher des dividendes et/ou revendre plus cher ce qu'ils ont acheté. Certains acteurs font le pari inverse, et misent sur la baisse des cours.

La principale méthode pour le faire s'appelle la vente à découvert, par laquelle l'investisseur vend immédiatement une action qu’il ne possède pas, en espérant qu’elle perde de la valeur. S’il a vu juste, il peut la racheter à une date future, lorsque son prix aura diminué, et empocher la différence. Si le titre grimpe, l'investisseur perd de l'argent en rachetant ce même titre à un cours plus élevé.

Un exemple concret : le cas de Casino

En 2019, le groupe Casino a fait l’objet de campagnes de vente à découvert virulentes, menées par des spéculateurs qui anticipaient une baisse du cours de l’action. Dans l’opinion de plusieurs fonds d'investissement, l’action de Casino avait atteint un prix bien trop élevé, notamment par rapport à son niveau d'endettement. Ils se sont alors mis à vendre massivement ce titre, à découvert. Cela se mesure très précisément, car pour vendre des titres à découvert — ou, dans le langage des traders, pour shorter une action — il faut l’emprunter à quelqu’un qui en est propriétaire. On a ainsi pu enregistrer qu’au plus haut, plus de 20% du flottant* du groupe Casino a été emprunté pour de la vente à découvert.

Initialement, tout s’est bien passé pour les spéculateurs. Le cours de l’action Casino qui était à plus de 45 euros au début du mois de mars a fortement chuté dans les semaines suivantes pour tomber à 27 euros (ouch !).

Le deuxième « round » a été nettement plus compliqué. Casino a annoncé un important plan de cession d’actifs, récoltant ainsi l’argent nécessaire à la réduction de son niveau d’endettement. En parallèle de quoi, l’homme d’affaires polonais Daniel Kretinsky est monté au capital début septembre, achetant d'un coup 5% du groupe, et réduisant de quelques 2,5 millions d’actions le flottant théoriquement disponible à l’emprunt.

Cette double stratégie a nettement fragilisé la position short des fonds, dont plusieurs se sont alors dépêchés de racheter les titres Casinos qu’ils avaient vendu à découvert, afin d'éviter la position douloureuse de celui qui vend des titres qu’il ne posséde pas et dont les prix s’envolent. Bien leur en a pris, car le cours de bourse de Casino a fini l'année à plus de 41 euros.

Pourquoi la vente à découvert est-elle controversée ?

En théorie, la vente à découvert est un mécanismes très sain, permettant à ceux qui croient à une baisse de prix sur un titre d’exprimer ce point de vue en le shortant à leurs risques et périls. Si leur analyse s’avère correcte, ils en profitent financièrement, s’ils se trompent, et que le cours de bourse monte, ils en assument le coût en  rachetant le titre qu’ils ont vendu à un prix plus élevé.

Le problème vient du fait que la vente à découvert a un effet mécanique sur le cours des actions fragiles, et qu'il peut en précipiter l’effondrement. Cela a eu des effets néfastes dans les années 30, qui ont poussé le gendarme de la bourse aux Etats-Unis, la fameuse Securities and Exchange Commission (SEC), à définir certaines règles pour encadrer la vente à découvert.

On voit bien en effet comment elle peut être utilisée à des fins de manipulation. Un spéculateur malveillant qui souhaiterait « massacrer » un titre, pourrait être tenté de propager des rumeurs plus ou moins fondées et de vendre massivement à découvert, ce qui aurait un effet auto-réalisateur, surtout dans des contextes de marchés nerveux et volatiles.

La vente à découvert, pour ou contre ?

Joker !

On ne peut que comprendre la frustration des dirigeants d’entreprises qui, attaqués par des spéculateurs qui diffusent des messages négatifs plus ou moins vrais, se retrouvent pris en otage par le marché. Certains investisseurs institutionnels se posent d'ailleurs des questions d'ordre éthique sur le sujet. La caisse de retraite des fonctionnaires Japonais a par exemple récemment déclaré réfléchir à un changement dans sa gouvernance, suite auquel elle ne prêterait plus les actions de son portefeuille à des fonds souhaitant spéculer sur la baisse des cours. Elon Musk, le fondateur de Tesla, a carrément estimé que « la vente à découvert devrait être illégale ! », étant lui-même fréquemment la cible de spéculations baissières.

Mais beaucoup d’experts soulignent également le rôle très sain que peut jouer l’outil de la vente à découvert dans un marché où l’offre et la demande sont censés pouvoir se rencontrer — et s'auto-réguler.

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*Le flottant, ou capital flottant, d'une société cotée en bourse correspond à la partie des actions effectivement susceptible d'être échangée sur le marché boursier. Il peut être exprimé en valeur ou plus fréquemment en pourcentage de la capitalisation.

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