Inégalités en France : Analyse du coefficient de Gini et de la fracture sociale

Oct 23, 2020

À l’heure ou l’inégale distribution des richesses est sur toutes les lèvres, Alexandria Ocasio-Cortez (AOC pour les intimes), membre très visible du Congrès américain et star montante du parti Démocrate a déclaré que chaque milliardaire était “un échec politique”. 

Mais vivons nous vraiment dans un monde si inégal ?

Le coefficient de Gini 

Du nom de son créateur, le statisticien Corrado Gini, ce coefficient représente la répartition de la richesse au sein d’une population donnée. L’indice varie de 0 à 1, où 0 correspond à une égalité parfaite et 1 à une “inégalité parfaite” c’est-à-dire la situation où un seul individu détiendrait toute la richesse, au détriment des autres. Calculé régulièrement par l’OCDE, il permet de comparer la distribution des revenus d’un pays à un autre. 

La France, pas si inégale !

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la France ne s’en sort pas mal. Notre coefficient ressort à 0,285 en 2018, mieux que la moyenne de 0,308 pour l’Union Européenne. Sans grandes surprises, les pays du nord sont en tête avec la Norvège (0,248), la Finlande (0,259) et les Pays-Bas (0,278). L’Allemagne en revanche — souvent considérée comme l’exemple à suivre du point de vue économique — présente un coefficient de 0,313. Le Royaume-Uni fait figure de mauvais élève avec 0,335. Et on ne parle évidemment pas des États-Unis à 0,378 ou de la Chine… à 0,468 (le comble pour un pays communiste !)

Source : Eurostat

Force est de constater cependant que l’écart entre les plus riches et les plus pauvres s’est de nouveau légèrement accru ces dernières années en France, inversant la tendance de la décennie précédente. 

Cela s’explique, entre autres, par le fait que les mesures prises récemment pour stimuler l’économie profitent surtout aux plus aisés. La réduction de la taxe d’habitation n’aide que les propriétaires de biens immobiliers. L’harmonisation de l'impôt sur les bénéfices financiers (flat tax) bénéficie par construction à ceux qui ont un patrimoine financier. Ces mesures rapprochent la France de la moyenne Européenne, sans l’atteindre. Mais elles creusent factuellement les inégalités. 

Alors pourquoi ce pessimisme ambiant ?

Le moins qu’on puisse dire, c’est que les réseaux sociaux n’aident pas à diminuer le sentiment d’injustice sociale et l’atmosphère de défiance à l’égard des élites.

Dans La révolte du public, Martin Gurri souligne que les médias sociaux ont donné aux masses la possibilité de s’exprimer comme jamais auparavant. Face aux flux incessants d’information qui s’y déversent, il est devenu plus simple pour les internautes de tout critiquer que de tomber d’accord. Dans certains cas, cela a été un formidable outil d’émancipation (révolution du Printemps Arabe, ou révolte démocratiques en Biélorussie)... dans d’autres, cela n’a fait que nourrir une culture du rejet de l’autre et notamment des élites.

Les algorithmes de curation de ces mêmes réseaux ont aussi joué un rôle déterminant. Puisque les contenus extrêmes génèrent des réponses émotionnelles plus fortes, les mauvaises nouvelles circulent beaucoup plus vite que les bonnes (plus d’engagement = plus de visibilité). Ce qui donne une importance exagérée aux discours anxiogènes et pessimistes.

Ce sentiment d’inégalité est aussi alimenté par le fait que certains ultra-riches adorent afficher leurs fortunes sur les réseaux sociaux. Pour un petit nombre, c’est même devenu un business. Ces comportements ont contribué à créer un certain mépris des élites dans leur ensemble. Ceci, alors que la plupart des personnes aisées sont tout à fait décentes. 

Dit autrement, les “riches” sont devenus une cible facile. 

Enfin, et c’est un réflexe humain, nous ne nous comparons presque jamais à nos voisins ou au passé. Nous avons tendance à penser par exemple que l’éducation des enfants et l’accès à une médecine de qualité sont “forcément” gratuits, puisque cela a “toujours été comme ça”. En réalité, il y a peu de pays où il fait aussi bon vivre que chez nous sur ces questions là, et cela que depuis un peu plus d'un siècle.

Les extrêmes s’écartent à nouveau

Une autre façon d’analyser les inégalités est de se pencher sur l’écart entre les classes les plus et les moins favorisées. Selon L’Observatoire des inégalités, en 2018, les 10% les plus riches ont gagné un peu plus de 61 000€ par an alors que les 10% les plus pauvres n’ont touché que 8 600 €. Après une période de croissance continue, cet écart s’est réduit à partir 2010… pour repartir à la hausse plus récemment.

Cette hausse risque de se poursuivre à cause de la crise économique provoquée par la propagation du COVID : le confinement a réduit la consommation, les jeunes diplômés ont beaucoup de difficultés pour trouver des emplois stables et le chômage est reparti à la hausse.

Attention au fatalisme

Pour bien comprendre ces statistiques, il faut garder en tête qu’elles ne sont que des photographies d’une situation à un moment donné. Plus simplement, les personnes qui appartenaient aux 10% les plus pauvres en 2005, ne sont plus forcément dans cette tranche dans les années suivantes. 

Certaines tranches de population évoluent dans le temps, peuvent grimper — ou descendre — sur l’échelle des revenus. L’Insee estime d’ailleurs que 20% des plus pauvres ne font plus partie de cette tranche d’une année sur l’autre. La question soulevée ici est celle de l'efficacité de “l'ascenseur social”, mais c’est une autre histoire (et donc un autre article !).


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